Madame, passionnant de vous écouter et je dois dire, assez vertigineux. Nous militons chaque jour pour contribuer au Grand Effort que la disruption numérique exige de la part des Français. C'est un vaste défi et je constate qu'il reste des transformations face auxquelles on ressent cette peur, ce frissonnement qui nous dit qu'il peut se passer quelque chose d'intéressant.
Je résume ici la démarche que nous proposons pour passer "de la cueillette à l'agriculture".
Accentuer encore la fluidité de l'information
Rendre le monde transparent pour développer un terreau où information, sentiments, et confiance se propageront facilement. Si les employés ont déjà des smartphones cela devrait suffire niveau couche matérielle, il reste la couche logicielle (avoir les bonnes app), les attitudes (se permettre de donner son avis), et la capacité d'expression (savoir exprimer son avis). Toutes ces couches sont bien entendu hautement interdépendantes.
Diversifier et enrichir les phénomènes d'influence mutuelle. Promouvoir des échanges transverses et à titre individuel, sans considération pour les titres ni pour les rôles : people-centric. Au travers de conversations, d'événements, et d'action de renforcement positif des attitudes exemplaires.
Nous sommes bien conscients que cette étape génère une plate-forme qui porte en elle des effets conséquents. Si tout le monde peut s'exprimer, si l'information circule vite et bien, c'est aussi une opportunité de renforcer les autres mouvements au sein de l'entreprise. Par exemple, les syndicats y trouveront aussi leur compte, car eux aussi bénéficieront d'une plus grande visibilité et compréhension des ressentis du personnel et de leur interaction avec les usagers, et les dialogues s'en trouveront à terme enrichis et fluidifiés. Mais c'est aussi une dépossession partielle du pouvoir des managers, qui vont, par cette transparence, perdre de leur emprise. Un impact non négligeable donc sur la gouvernance de toute l'organisation. Il faut avoir confiance qu'en distribuant outils et permission de communiquer, on défend les intérêts de tous, personnel et usagers, et on rend progressivement obsolètes les tentatives de manipulations par désinformation ou le détournement d'efforts en faveur de causes non pertinentes.
Identifier vos Causes et constituer vos tribus.
Sur le terrain ainsi constitué vont se confronter des idées en bazar. Il s'agit donc de faire gagner ses idées et pour bien commencer la bataille, mieux vaut être dans le camp des gentils. Il convient donc, avant toute chose, d'identifier sa raison d'être, sa Cause. Une Cause qui transcende l'organisation, comme dirait Mao. Une Cause par rapport à laquelle chacun sera invité à se positionner, et qui sera invoquée pour fédérer autour d'une action commune. Une cause de préférence noble, fédératrice, de sorte qu'on ne se positionne pas pour ou contre, mais plutôt sur une échelle d'intensité : indifférent, appréciatif, sensible, fan.
Nota : Il est possible pour une organisation d'être au service de plusieurs causes, pour peu qu'elles n'entrent pas en conflit, mais il faut alors savoir se positionner en suiveur si l'on croise une organisation entièrement dédiée à l'une d'elles. Pour mon organisation de 300 personnes, nous avons choisi 5 causes.
C'est alors qu'autour de ces causes se constitue une communauté, une "tribu" dirait Seth Godin. Une tribu n'est pas une organisation. C'est une entité floue, à l'image d'une fonction d'onde. Un individu donné est sensible à des degrés divers aux différentes causes qui lui sont présentées, et décide en fonction d'investir son temps en proportion. Tout l'art d'une tribu qui fonctionne bien, est de permettre à tout un chacun de s'y positionner à la distance correspondant à sa sensibilité. Bien entendu on essaie de faire changer les sensibilités des personnes, pour les rapprocher du coeur, mais il est impératif de savoir repousser les personnes qui ne sont pas authentiquement proches de la Cause, au risque de les voir détruire la motivation de leur entourage.
Nota : le positionnement d'un individu relève de son identité et ses valeurs personnelles, et non pas de son rôle ou sa fonction dans une quelconque organisation. En conséquence, le statut d'un individu (salarié, intérimaire, consultant, freelance, usager, partenaire, observateur ...) n'entre en rien dans son affinité avec la Cause et donc son engagement dans la tribu. La tribu, comme la cause, transcende l'organisation.
C'est particulièrement intéressant à notre époque où, l'engagement étant grandement facilité, apparaissent en nombre des interlocuteurs "modérés" et "constructifs" qui auparavant n'auraient pas fait l'effort de s'impliquer dans la cause.
Comment faire ? Quelques idées d'actions
1. Bien entendu, commencer par identifier votre/vos Cause(s). Tempête de cerveau, consultation, forum ... tous les moyens sont bons.
2. Equiper les gares d'un écran tactile donnant l'opportunité à chaque passager entrant de donner une toute petite somme à une bonne oeuvre de son choix (ou au moins un "like"). Le grand total donnera des sommes conséquentes, mais surtout amorcerait chacun dans un état d'esprit positif pour la durée de son voyage. A défaut d'une borne tactile, une app mobile avec géolocalisation peut donner le même résultat (mais avec une audience moindre).
3. Une app mobile qui permette à chacun de se "check-in" dans le train où il se trouve, ou dans sa gare , indiquant le train où il compte monter. Le conducteur, s'il se check-in aurait un traitement particulier. Grâce à ces informations, une personne à quai qui attend son train peut le voir s'approcher sur une carte. On pourrait récupérer aussi les délais d'attente et mesurer l'impact d'un incident en temps réel.
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