mercredi 29 janvier 2014

Human to Human

Cher Vincent, cher Pierre, merci pour cette discussion très ouverte et très intéressante sur la pénétration de twitter en entreprise, et sur les enjeux et problématiques associés: ouverture vers le monde extérieur, démocratisation de la communication, empowerement des employés à tous les niveaux, inclusion dans la stratégie générale... mais aussi les tensions émergentes entre générations et strates managériales, le franchissement de la ligne de faille sur la courbe d'adoption....

La mauvaise nouvelle, qu'on connait déjà, c'est que bien que la disruption numérique ait pratiquement détruit des structures industrielles colossales (Musique, Presse), la vaste majorité continue de se comporter comme si ça n'était jamais arrivé. Les entreprises, particulièrement les plus grandes et les plus organisées, continuent de traiter toute forme de publication accessible au public comme à l'époque Big Media. Et les dirigeants et cadres supérieurs qui créent des comptes le font pour “surveiller” ce que disent les gens, et leurs collaborateurs.

J'admire votre volonté d’aider les gens à oublier la mauvaise éducation qu’on nous a inculquée, cette culture du silence et de l’interdiction de parler, cette notion que l’expression et l’échange sont réservés à des élites diplômées en images et en lettres.

Aujourd’hui, on ne veut plus d'une affiche 4x3 ni d'un mail automatique qui nous explique qu'un technicien anonyme s’occupe de nous raccorder au gaz, ou nous brancher notre box, que notre conducteur veille à notre sécurité ou à nous acheminer rapidement à notre destination (wink @Btilloy). On veut la personne, on veut l’entendre de sa bouche ! Notre héros ça n’est plus la machine, le process, l’ERP. Notre héros c’est l’humain !

Maintenant que l'information circule facilement, les vieux pipelines où elle circulait deviennent obsolètes. Alors forcément, les élites de jadis, préposées à la surveillance de ces tuyaux, interprètent tous ces flux nouveaux comme des fuites à colmater.

Après le B2B et le B2C, nous sommes entrés dans l’ère du H2H, Human to Human*.


(*) Merci encore Duc Ha Duong de m'avoir fait découvrir cette formule [Edit: décrite dans cet article par son auteur, Bryan Kramer]

mardi 28 janvier 2014

La #FrenchTech, c'est quoi ? C'est Moi !

Ma dernière rencontre avec David Monteau à la #FrenchTech Galette fut l'occasion pour moi de comprendre (enfin !) les trois grands volets du "Programme précédemment connu sous le nom de Quartiers Numériques" :

  1. Un label pour les territoires
  2. Des investissements d'avenir
  3. Une identité collective 
La labelisation consiste à identifier en France les métropoles les plus dynamiques dans le secteur innovation / numérique. Faudrait lire la doc pour bien comprendre les finesses mais en gros il faut des universités, des incubateurs, des boites, des "champions" (success stories type Criteo, Sigfox, etc.), des financements, des collectivités locales impliquées, des grosses boites techno aussi... et tout ça qui se parle et qui s'écoute en Pleine Conscience et Harmonie. Suite à un audit de plusieurs mois une agglomération sera labelisée pour quelques années et ça sera bien pour elle et pour ses agents économiques qui auront un petit package comme des faveurs coupe-file auprès d'UbiFrance par exemple. Chez Flying Blue, vous êtes Silver.

Les investissements d'avenir c'est les 200 Millions. Il s'agit d'investissements (pas de subvention !) dans des initiatives privées qui sont donc censés rapporter du bénef à la CDC à la fin. Ca peut être un incubateur (privé !), un accélérateur, voire même un fonds d'investissement en apport minoritaire. Il m'est avis que c'est pas forcément 200M€ de plus ou de moins qui vont changer le visage de la FrenchTech française, mais c'est toujours un facteur de mitigation du risque pour le partenaire privé, et je comprends aussi le point que si on met pas de sous dans un programme, on se fait taxer de pipoteur donc va pour les 200 milllions, en espérant qu'ils ne nous diviseront pas trop dans des luttes fratricides pour la cagnotte.

L'identité collective. Ah ! Voilà un sujet qui m'intéresse ! Si les 200 Millions c'est "I have a plan", le mouvement French Tech, c'est "I have a Dream" ... le rêve que la réputation des Frenchies  dans la tech soit à la hauteur de leur mérite... le rêve que chaque entrepreneur colle "FrenchTech" sur ses slides, parce que ça lui fait marquer des points ... le rêve que le silence se fasse quand un Frenchie entre dans la pièce, qu'on murmure  "ouh attention les copains, la #FrenchTech est là !" La French Tech, ça doit être 10 points de Klout, direct ! Bref, faisons face à London Tech City, à Startup Nation, à Silicon Alley et consors. Construisons-nous une image pour nous autres acteurs de la techno française avec, osons-le, un rayonnement important à l'international. L'idée est donc que chacun puisse dire, s'il se sent en être, qu'il fait partie de cette grande famille. C'est ça, la vraie #FrenchTech !

En fait, je trouve même un peu limite de tenter de nous voler notre nom pour les deux premiers pans du programme. J'espère que le label aura un nom assez voire très différent pour qu'on ne confonde pas. Les 200 M€ s'appellent déjà Investissements d'Avenir et c'est très bien comme ça.
Et que va donc faire le gouvernement dans ce troisième volet ? Rien. Ou quasi-rien. Oui il y a une histoire de portail, et c'est cool, mais un portail ne crée pas une communauté. Il la sert. C'est à nous tous, collectivement, de nous saisir de ce terme pour lui faire porter nos couleurs. N'attendons rien de l'Etat et constituons ensemble une FrenchTech Nation qui perdurera durant toutes les générations à venir. On me parle de 15M€ pour faire connaître cette tribu, mais je réponds qu'une identité, une âme, ça n'a pas de prix. Personne n'a payé pour faire la réputation du mot "Silicon Valley". Personne n'en détient les droits, personne ne décide qui en est et qui n'en est pas. A chacun de choisir son camp.

Question subsidiaire : au fait, qui peut me citer UNE startup sortie de TechCity ? 

dimanche 26 janvier 2014

Merci pour le déjeuner

Madame, passionnant de vous écouter et je dois dire, assez vertigineux. Nous militons chaque jour pour contribuer au Grand Effort que la disruption numérique exige de la part des Français. C'est un vaste défi et je constate qu'il reste des transformations face auxquelles on ressent cette peur, ce frissonnement qui nous dit qu'il peut se passer quelque chose d'intéressant.

Je résume ici la démarche que nous proposons pour passer "de la cueillette à l'agriculture".

Accentuer encore la fluidité de l'information

Rendre le monde transparent pour développer un terreau où information, sentiments, et confiance se propageront facilement. Si les employés ont déjà des smartphones cela devrait suffire niveau couche matérielle, il reste la couche logicielle (avoir les bonnes app), les attitudes (se permettre de donner son avis), et la capacité d'expression (savoir exprimer son avis). Toutes ces couches sont bien entendu hautement interdépendantes.

Diversifier et enrichir les phénomènes d'influence mutuelle. Promouvoir des échanges transverses et à titre individuel, sans considération pour les titres ni pour les rôles : people-centric. Au travers de conversations, d'événements, et d'action de renforcement positif des attitudes exemplaires.

Nous sommes bien conscients que cette étape génère une plate-forme qui porte en elle des effets conséquents. Si tout le monde peut s'exprimer, si l'information circule vite et bien, c'est aussi une opportunité de renforcer les autres mouvements au sein de l'entreprise. Par exemple, les syndicats y trouveront aussi leur compte, car eux aussi bénéficieront d'une plus grande visibilité et compréhension des ressentis du personnel et de leur interaction avec les usagers, et les dialogues s'en trouveront à terme enrichis et fluidifiés. Mais c'est aussi une dépossession partielle du pouvoir des managers, qui vont, par cette transparence, perdre de leur emprise. Un impact non négligeable donc sur la gouvernance de toute l'organisation. Il faut avoir confiance qu'en distribuant outils et permission de communiquer, on défend les intérêts de tous, personnel et usagers, et on rend progressivement obsolètes les tentatives de manipulations par désinformation ou le détournement d'efforts en faveur de causes non pertinentes.

Identifier vos Causes et constituer vos tribus.

Sur le terrain ainsi constitué vont se confronter des idées en bazar. Il s'agit donc de faire gagner ses idées et pour bien commencer la bataille, mieux vaut être dans le camp des gentils. Il convient donc, avant toute chose, d'identifier sa raison d'être, sa Cause. Une Cause qui transcende l'organisation, comme dirait Mao. Une Cause par rapport à laquelle chacun sera invité à se positionner, et qui sera invoquée pour fédérer autour d'une action commune. Une cause de préférence noble, fédératrice, de sorte qu'on ne se positionne pas pour ou contre, mais plutôt sur une échelle d'intensité : indifférent, appréciatif, sensible, fan.
Nota : Il est possible pour une organisation d'être au service de plusieurs causes, pour peu qu'elles n'entrent pas en conflit, mais il faut alors savoir se positionner en suiveur si l'on croise une organisation entièrement dédiée à l'une d'elles. Pour mon organisation de 300 personnes, nous avons choisi 5 causes.
C'est alors qu'autour de ces causes se constitue une communauté, une "tribu" dirait Seth Godin. Une tribu n'est pas une organisation. C'est une entité floue, à l'image d'une fonction d'onde. Un individu donné est sensible à des degrés divers aux différentes causes qui lui sont présentées, et décide en fonction d'investir son temps en proportion. Tout l'art d'une tribu qui fonctionne bien, est de permettre à tout un chacun de s'y positionner à la distance correspondant à sa sensibilité. Bien entendu on essaie de faire changer les sensibilités des personnes, pour les rapprocher du coeur, mais il est impératif de savoir repousser les personnes qui ne sont pas authentiquement proches de la Cause, au risque de les voir détruire la motivation de leur entourage. 
Nota : le positionnement d'un individu relève de son identité et ses valeurs personnelles, et non pas de son rôle ou sa fonction dans une quelconque organisation. En conséquence,  le statut d'un individu (salarié, intérimaire, consultant, freelance, usager, partenaire, observateur ...) n'entre en rien dans son affinité avec la Cause et donc son engagement dans la tribu. La tribu, comme la cause, transcende l'organisation.
C'est particulièrement intéressant à notre époque où, l'engagement étant grandement facilité, apparaissent en nombre des interlocuteurs "modérés" et "constructifs" qui auparavant n'auraient pas fait l'effort de s'impliquer dans la cause.

Comment faire ? Quelques idées d'actions

1. Bien entendu, commencer par identifier votre/vos Cause(s). Tempête de cerveau, consultation, forum ... tous les moyens sont bons.

2. Equiper les gares d'un écran tactile donnant l'opportunité à chaque passager entrant de donner une toute petite somme à une bonne oeuvre de son choix (ou au moins un "like"). Le grand total donnera des sommes conséquentes, mais surtout amorcerait chacun dans un état d'esprit positif pour la durée de son voyage. A défaut d'une borne tactile, une app mobile avec géolocalisation peut donner le même résultat (mais avec une audience moindre).

3. Une app mobile qui permette à chacun de se "check-in" dans le train où il se trouve, ou dans sa gare , indiquant le train où il compte monter. Le conducteur, s'il se check-in aurait un traitement particulier. Grâce à ces informations, une personne à quai qui attend son train peut le voir s'approcher sur une carte. On pourrait récupérer aussi les délais d'attente et mesurer l'impact d'un incident en temps réel.

Construire le monde de demain

Fini l'économie industrielle de la tour Eiffel, où il fallait 100 ingénieurs pour concrétiser l'idée d'un seul entrepreneur... Nous entrons dans une ère où les ingénieurs sont légion, et ce sont les entrepreneurs qui fabriquent le monde de demain.

Je pense que nous devons nous attacher à prendre chaque fonction, nous demander comment elle sera effectuée dans 10 ans, puis essayer d'accélérer la transformation et la rendre la moins douloureuse possible.
Oui, douloureuse : demandez aux taxis et aux journalistes... Ou bien aux scribes quand Gutenberg est arrivé avec sa machine infernale. On voit bien ce qu'est devenu la corporation des scribes...
Exemple : comment fonctionnera une boulangerie dans 10 ans ? Elle saura exactement combien de pains elle doit faire ? Elle aura une machine à combiner les farines pour une infinité de variétés ? Le pain sera livré par drone ? Elle vendra aussi de je viande et des légumes ? Je n'en au aucune idée mais je sur sûr qu'il y a des passionnés visionnaires de la baguette prêts à faire un ou plusieurs de ces paris. Ça va partir un peu dans tous les sens, il faut tous les encourager à prendre ces risques.
Évidemment vu d'ici en 2014 je ne sais pas comment elle fonctionnera, mais la boulangerie de 2024 nous parait super technologique. Il y a fort à parier que les passionnés innovants cités plus haut vont avoir besoin pour réaliser leur rêve de technologies non disponibles ou trop onéreuses il y a 10 ans. Même si c'est un rêve simple et classique comme prédire les bonnes quantités.

En fait, peut-être bien qu'il n'y aura plus de boulangeries dans 10ans, c'est une possibilité ... mais on continuera tous à se nourrir ! Donc attention à bien regarder les activités individuellement, en faisant fi de la façon dont notre société les a organisées en métiers. Par exemple les journalistes ont, entre autres, une activité de rapporter l'information, et une autre de l'analyser. Ces deux activités ne seront pas forcément autant couplées dans le même métier demain, car si les technologies de l'information ont rendu la circulation de l'information de plus en plus facile et fluide, leur analyse et mise en perspective reste une tâche qu'on a du mal à automatiser. Pareil si on part du principe qu'il y aura toujours des boulangeries demain, on se coince déjà dans un cadre qui va peut-être nous faire rater des choses. Il faut considérer séparément la fonction nutritive de la fonction de cohésion sociale d'un quartier et de la fonction émotionnelle etc. (il reste des boulangers qui ont compris que le plaisir d'aller chercher son pain et d'avoir une interaction agréable, sans jugement ni arrières-pensées, même brève, fait partie intégrante de leur proposition de valeur et justifie de marcher 50m, voire 150m de plus pour aller jusqu'à la deuxième boulangerie).

Il faut donc stimuler aujourd'hui les entrepreneurs passionnés qui portent une vision et qui sont prêts à monter une boite le mois prochain. Et dire à ceux qui veulent entreprendre pour des raisons alimentaires (sans Meaning au sens Kawasaki du terme), qu'en effet il faut bien vivre mais de se méfier quand même des premiers, qui auront toujours plus d'énergie et de combativité.

(Post inspiré d'une conversation sur Facebook avec Antonin Michelet et Bruno Jacquemin sur la #FrenchTech)

vendredi 24 janvier 2014

Notre taux de "codification" ?

Créer un acteur de classe mondiale dans un secteur, c’est également mobiliser en amont d'énormes moyens de production de cerveaux. 


Ainsi la France est une superstar de l’aéronautique. Mais pour cheminer des inventions de Louis Blériot à la conquête spatiale avec Ariane, pour créer un champion mondial de l'aéronautique avec Airbus, il faut créer une véritable infrastructure, qui passe par la formation d'un tissu de techniciens, d'ingénieurs, de logisticiens qui n'existaient pas et sont tous indispensables à la construction d'un avion moderne.

Donc quand on voit la taille de cette liste de formations aéronautiques, je pense qu’il n’y a pas de grosse surprise. 

Avec Duc Ha Duong, on parlait hier de 42 et Simplon, et de la poignée d'initiatives similaires qui naissaient en France.

Le souci, c'est que contrairement à l'aéronautique, le numérique n'est PAS un secteur. Il l'a été, mais ne l'est plus.

Le numérique fait désormais partie intégrante des écosystèmes socio-économiques, et il convient de l'enseigner comme les mathématiques, les sciences naturelles, et la physique, et probablement même avant elles.

A l'école, comme en formation continue, former nos concitoyens au code n'est pas un débat, c'est une urgence !

Cet extrait de la déclaration de Hambourg sur l'éducation des adultes résonne tout particulièrement à mes oreilles :
L'alphabétisation, conçue dans une acception large comme l'acquisition des connaissances et compétences de base dont chacun a besoin dans un monde en rapide évolution, est un droit fondamental de la personne humaine
La bonne nouvelle, c'est que la France, déjà championne des mathématiques, a tous les atouts pour créer de super codeurs.
Donc ça n'est pas une poignée des 42 et des Simplon qu'il faut créer, mais un millier !

mercredi 22 janvier 2014

Pourquoi la France doit se doter d’une infrastructure Cloud souveraine ?

J’aimerais qu’on arrête de se moquer de Cloudwatt. Cloud souverain ce n'est pas simplement Cloud français, et je m'inquiète que la distinction ne soit pas assez prise au sérieux.

Moi j’avais compris que la mission de Cloudwatt était de mettre en place le Cloud souverain Français. Je n’ai pas été très fort en histoire-géo à l’école, mais quand même j’ai retenu 2-3 choses :

  1. Lorsqu’une nation se dote d’un état pour assurer la paix civile, ses membres consentent à abandonner une partie de leurs libertés au profit du gouvernement qui les gère en imposant à tous des contraintes normatives (les lois).
  2. Ce même gouvernement se doit également de protéger ses membre des menaces étrangères, en garantissant l’indépendance de la nation. Assurer cette défense requérait de maîtriser les technologies permettant de fabriquer des armes, mais en temps de paix autant fabriquer des voitures, c’est plus utile et cela suffit à décourager les pays voisins. Du moins ceux qui n’ont pas la même maîtrise industrielle.
  3. Pour les autres, il y a une autre façon d’éviter un nouveau conflit qu’on a mis en pratique au XXème siècle entre la France et l’Allemagne, avec la Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier : il suffit de mettre en commun précisément ces même ressources naturelles cruciales pour fabriquer des armes à l’époque.

Pourquoi est-ce que je vous parle de cela aujourd’hui ? Revenons à notre cher univers numérique :

Sur Internet, les usagers du Net se regroupent et confient une partie de leur libertés à des entités centralisatrices qui fixent des conditions d’usage en échange de services rendus : les plates-formes. En Europe, ces plates-formes sont aujourd’hui pour la plupart des entreprises privées américaines. Dénuées de la légitimité d’avoir été élues démocratiquement, ces plates-formes compensent ce handicap en tissant un lien de confiance avec nous. L’enjeu majeur pour elles : la gestion de notre identité numérique et de nos données personnelles.

Assurer l’indépendance de notre nation ne requiert pas nécessairement d’avoir nos propres plates-formes (c’est très difficile), mais requiert de maîtriser les technologies permettant de les fabriquer. Il est donc crucial de développer au sein de notre pays un capital intellectuel suffisamment massif et à la pointe dans les technologies de l’information pour pouvoir, en cas de besoin suppléer à la carence d’un Google à qui l’administration américaine aurait ordonné de couper la France. Saluons au passage Simplon et l’école 42 pour leurs efforts dans ce domaine.

La mutualisation des ressources dans l’Internet, c’est bien entendu le mouvement libre (“free as in free speech”), mais aussi coté hardware, le développement des infrastructures Cloud.

Autrement dit :

L’indépendance numérique de la France (je laisse au lecteur de juger si cela est synonyme d’indépendance tout court), c’est permettre à tous les Français de confier leur identité numérique ainsi que leurs données personnelles à un acteur totalement indépendant d’influences extra-nationales, et ceci de façon durable. Et tout comme un particulier a le droit de choisir le prestataire chez lequel il héberge ses données, la France, terre d’accueil se devrait également d’accepter les étrangers qui choisissent de lui confier la protection ou le traitement de leur données.

L’indépendance numérique de la France, c’est de disposer de l’infrastructure qui permette à des plates-formes françaises d’émerger et atteindre l’échelle mondiale. Une infrastructure qui ne doit pas dépendre de la FCC ou d’autres organismes extra-nationaux pour leur gouvernance (risques bien réels comme vient de nous le rappeler la récente affaire sur a neutralité du Net).

L’indépendance numérique de la France, c’est soutenir le mouvement libre dans l’infrastructure cloud (Openstack), mais aussi en mettant à disposition une quantité massive de ressources partagées, qui vont contribuer à un équilibre plus sain des forces en présence dans le domaine. Notamment l’inférence d’organismes extra-nationaux dans les services à venir de Quantified Self, Internet of Things et e-Health risque de poser de gros problème à notre régulateur (car comme Lawrence Lessig explique : “code is law”).

C’est la mission de Cloudwatt que de devenir notre champion français sur ces trois enjeux. 

Le CEO de Cloudwatt n’est pas le gestionnaire d’une mee-too qui essaierait de profiter d’un nouveau secteur à la mode, en forte croissance, pour capter une fraction du gâteau. Il porte le mandat de protéger l’autonomie de notre pays dans une période où des plates-formes “barbares” s’arrogent, avec notre plein consentement, le rôle de gérer nos vies et garantir notre identité à la place de notre gouvernement.

Bref CEO de Cloudwatt, c’est un job de héros de la nation. “We need you to lead us” comme dirait Seth Godin. J’espère de tout coeur que le successeur de P. Starck se sentira effectivement pleinement conscient de la mission dont il est investi, ainsi que de son enjeu.

La news : 

lundi 20 janvier 2014

The Connection Economy

Notre économie industrielle devient une économie de la connexion, où la création de valeur se redéfinit au-delà de l’argent et des biens matériels, par les flux d’information, de confiance et d’émotions.

We believe the industrial economy that was build by the engineers is now transitionning towards the connection economy built by the entrepreneurs. The value we create is now driven by how much valuable information we can produce, how much love and trust we can earn, and how often we let innovation spur. It boils down to creating connection between human beings whose quality is becoming of greater importance than the quality of the product or service you are offering.
“If your factory burns down but you have loyal customers, you’ll be fine. On the other hand, if you lose your customers, even your factory isn’t going to help you – Detroit is filled with empty factories.”
Seth Godin


The 4 pillars of the connection economy are defined by Seth Godin as:
  1. Coordination : Get people to be synchronized, create opportunities for people to connect by putting those with the same motives at the same place at the same time
  2. Trust : Create a climate of “default to trust” that will allow exchanges and transaction to occur with minimal transaction cost
  3. Permission: A connection will start only once you’ve earned the privilege of getting someone who accepts listen to you. However we see too many occurence of people having permission who do not use it because of muting social norms.
  4. Exchange of ideas : Once connection is taking place, it has to go beyond the simple “poke” to get valuable. It becomes fruitful when ideas gets confronted and feelings reinforced, or original ideas emerge.
Goods still need to be produced of course but no one is interested in the 7th sigma, in the absolute zero defects. Quality standard is a given and the lonesome defect has actually an important role in creating connections with your customers, maintaining your humanity though imperfection, and building personal stories 

Watch Seth Godin explain about the Connection Revolution (3'39) :
www.youtube.com/watch?v=sKXZgTzEyWY



mardi 14 janvier 2014

G7 vs. Über : à qui profite le crime ?

J'invite en préambule ceux qui n'ont pas suivi ce qu'il se passe entre la G7 et les VTC à lire l'excellent billet écrit en octobre dernier par Nicolas Colin : Les Fossoyeurs de l'Innovation.

Ça fait quelques semaines que le problème me trotte dans la tête, car un tel niveau d'absurdité est difficile à admettre : ces voitures premium, qui coûtent plus cher mais viennent renforcer la masse de véhicules disponibles aux heures de pénurie, vont-elles vraiment voler leurs emplois aux bons chauffeurs de taxis parisiens ? C'est tout de même peu crédible.

En réalité, je pense que c'est l'attractivité même de bosser pour G7 et consors qui est menacée par les VTC. 

La licence de taxi a bien longtemps été un outil d'ascension sociale, grâce auquel en travaillant bien, on atteignait un bon niveau de revenus. Cela fait des années que les grandes centrales de taxi ont vidé la licence de ce rôle, et dépouillent les artisans, captant l'intégralité de la valeur ajoutée. Car aujourd'hui, les taxis qui ne sont pas propriétaires de leur licence, sont obligés de la louer extrêmement cher, et perdent quasiment tout espoir de s'enrichir.

Alors quand des sociétés VTC leur donnent la possibilité de venir travailler dans de meilleures conditions, en étant maîtres de leurs horaires, et en gagnant plus d'argent, cela représente une menace. Ce qui est menacé, ce n'est pas tant la valeur des licences des artisans qui les possèdent, mais la rentabilité de celles de MM. Rousselet et Metz. Quelle ironie (!) lorsque ce dernier déclare les compagnies VTC de "créer des emplois fragiles d'auto-entrepreneurs", alors que ce sont leurs propres manoeuvres politiciennes qui ont créé la précarité, remettant en cause les business models propres et transparents de ces sociétés qui agissaient en pleine légalité !

L'autre menace de perte sèche qui plane sur la G7, concerne son service de "voitures VIP avec chauffeur", (ben oui, il y a des lingettes et bouteilles d'eau, s'il vous plait!). Ce service facturé bien cher n'offre pas grand chose par rapport à une offre VTC, surtout si ces derniers venaient à se développer plus.

Mais comment ont-ils convaincu les politiques ?

Là je ne vais pas prétendre savoir qui a murmuré quoi à l'oreille de qui ! Mais je refuse de croire que suffisamment de politiques se font graisser la patte pour passer ou laisser passer un décret tueur d'innovation... donc au lieu de crier "tous pourris!", je m'aventure à crier "tous crédules !"
Car, quand il s'agit de pitcher l'idée aux politiques, ça m'étonnerait que M. Rousselet dise "mes licences ne me serviront plus à rien, les benêts à qui je les loue vont tous reprendre leur indépendance et partir gagner plus d'argent, et mes voitures avec chauffeur surfacturées je ne vais pas trop savoir quoi en faire non plus". Je pense plutôt qu'il tient le même discours qu'à la presse, expliquant qu'il est le fer de lance de l'innovation française, si-si-crois-moi-la-preuve-j'ai-des-GPS-dans-les-voitures. Mais ce discours, il le tient à des amis, et peut-être des amis de son père, qui ne comprennent pas grand chose à l'innovation, à ses processus, et sont très impressionnés lorsqu'on leur montre une application sur un iPhone.

Car pas idiots, les grands pensent à leur avenir ! Ils copient tous les trucs du moment. Des applis de réservation de G7 (pas moins de 3 sur iPhone, ici, , et pour les abonnés) en passant par des services comme weCab ou eCab, il n'y a rien d'original, rien de novateur.

Moi je préfère penser que c'est en toute bonne foi et surtout en confiance, que nos hommes politiques votent des lois ineptes et passent des décrets de la même qualité. J'espère qu'on en trouvera suffisamment d'intelligents pour leur dire de changer de conseillers.

Et l'avenir, il ressemble à quoi, alors ?

Évidemment, ce sont les terribles événements d'hier (agression de chauffeurs et usager d'Über par des taxis grévistes) qui m'ont décidé à coucher quelques lignes.

Mais ce qui compte le plus, c'est le problème de fond : si Rousselet l'emporte, ça ne sera pas Über le perdant ! Über est dans 26 pays, 68 villes, et se porte extrêmement bien. Ceux qui perdront, ce sont ces dizaines d'entrepreneurs du numérique qui ont fait le choix d'innover, de tenter des business models apparemment similaires pour un Rousselet ou un Valls, mais finalement tous un peu différents, s'adressant à des tribus distinctes, et tous avec une chance de créer une alternative française aux puissantes machines américaines.

Que faudra-t-il pour que nos politiques comprennent l'ampleur de la révolution numérique et s'initient aux vrais mécanismes en action et leurs enjeux ? pour qu'ils préparent l'avenir de notre pays en s'inscrivant dans le temps au lieu de planifier la prochaine élection, le prochain tweet ?

Le problème, c'est qu'ils ne comprennent pas.

Au 19ème siècle, les usines fonctionnaient avec de grosses machines à vapeur, dites "stationnaires", qui entraînaient de complexes systèmes de courroies et engrenages, souvent dangereux, et mécaniquement peu efficaces. Lorsqu'on a commencé à leur substituer des moteurs électriques (plus d'un demi siècle après leur invention), on s'est contenté de remplacer la vieille machine par une nouvelle, et ça a pris plusieurs dizaines d'années avant que les ingénieurs ne décident qu'on pouvait changer tout le design d'une usine, et placer plusieurs moteurs électriques dans chaque bâtiment, au lieu d'un énorme à l'extérieur.

Beaucoup de nos décideurs d'hier raisonnent ainsi. Ils pensent comprendre la puissance d'internet, et en font (enfin) la promotion : "prenons nos structures actuelles, et ajoutons leurs internet !"
  • Prenons les radio-taxis, et ajoutons leur internet !
  • Prenons nos compteurs à gaz, et ajoutons leur internet !
  • Prenons notre enseignement supérieur, et ajoutons y internet !
  • Prenons nos lecteurs de CDs et ajoutons... oops !
Eh oui, pour la musique ça a été trop vite, et ça ne se passe pas vraiment comme ça. Eh bien ce qu'Über a montré au monde, ça n'est pas internet dans les taxis! C'est une révolution de la relation au transport. Au transport de personnes comme au transport de biens. Tout comme pour un problème de mathématiques, la démonstration qu'ils ont faite, on ne peut pas la nier, et des gens dans le monde vont s'en servir pour résoudre le problème suivant, tandis qu'on interdit à nos chercheurs de l'étudier.

Aurons-nous encore des codeurs, des hackers, des inventeurs, lorsque nos grands patrons et ministres actuels seront partis à la retraite ?

lundi 13 janvier 2014

Faire émerger une stratégie numérique dans la région PACA [ou une autre]


La semaine dernière, nous avons été sollicités par notre copain Minh qui voulait aider la région PACA à travailler sa stratégie numérique. C'est intéressant car c'est une région très dynamique avec un tissu économique bien complet entre Nice, Marseille, Toulon... l'occasion de partager notre méthodologie de transformation des organisations !

Constat préliminaire : tout est déjà là. Une mission est en cours pour le documenter, mais en gros le public, le privé, l'éducation, la recherche, les incubateurs, l'argent ... tous les ingrédients sont présents et actifs ! Ce qui nous a fait nous demander tout naturellement : de quoi ont-ils besoin, puisqu'un besoin s'exprime ? On a fini par comprendre qu'il fallait une tierce partie qui mette un peu tout le monde d'accord. Faire parler les gens qui savent, laisser émerger les meilleures idées, et enfin en susciter l'adhésion de toutes les parties prenantes.

La mission consiste donc pour l’essentiel en des actions de communication et d’échanges visant à créer un maximum de connexion de qualité entre les acteurs locaux dans le but non seulement d’une cohésion mais aussi de faire émerger les meilleures options. Comme l'explique Seth Godin : la valeur est dans la création de connections de qualité. Mais une connection de qualité, c'est plus qu'une rencontre face à face ou un échange de bonnes paroles. C'est un échange d'idées qui, au travers d'un changement dans l'intention des parties aboutit à l'engagement dans des actions concrètes. Des actions qui vont idéalement démarrer durant notre mission mais surtout perdurer bien au-delà. Voici donc ce qu'on a répondu. En espérant, cher lecteur, que cela pourra vous inspirer ! 

Se connecter pour s'engager, s'engager pour agir

"Inspirée des méthodologies Agile qui nous sont familières depuis des années, nous avons développé une approche pratique qui tire parti des récentes évolutions des technologies de l’information.

Privilégiant la coordination sur la planification, elle associe de façon synchrone l’idée à la relation, puis la relation à l’action.

Partant du Groupe de Travail Numérique (GTN) constitué d’individus porteurs d’idées et de visions personnelles qualifiées, nous nous attachons à connecter ces individualités dans une atmosphère propice à l’échange, afin de faire circuler et confronter les différentes visions du monde. Nous nous assurons de la convergence des visions en solidarisant les acteurs autour de Causes communes supérieures aux intérêts personnels.

Une fois le dialogue établi et qu’une vision se dégage, nous accompagnons la communauté dans l’action au travers des engagements qu’ils ont pris d'eux-mêmes, en public, au sein du groupe de travail. La constance et la permanence des échanges, assurés par les outils rendant l’information liquide, permet une excellente visibilité pour chacun et maintient une grande régularité dans la qualité des livrables. 

Notre recette secrète : le Maven Toolkit

Concrètement, nous disposons pour ce faire d’une “boite à outils” d’activités (dit "Maven Toolkit") que nous pouvons proposer à la carte, en adaptation permanente avec l’évolution de la communauté.
Ces activités se distinguent selon quatre dimensions :
  1. leur aspect divergent (réflexion exploratoires) ou convergent (alignement et solidarisation) 
  2. leur capacité à mesurer l’état de la communauté (maturité, degré d’alignement, compréhension des enjeux et des contraintes, etc.) 
  3. leur capacité à engager les acteurs dans l’appropriation des actions (“empower”) 
  4. leur capacité à créer plus ou moins de connexion (quali/quanti) entre les acteurs. 
Les activités sont choisies en fonction de ces quatre dimensions, recherchant la meilleure adaptation avec la situation observée. 

Mise en oeuvre

L’initialisation requiert bien entendu quelques étapes préalables importantes détaillées ci-dessous, (A. B. C.), effectuées au début de la mission, lors des phases de préparation et d’alignement. Puis la phase D. se répète par itération jusqu'à obtention d'un livrable satisfaisant.

A. Lancement de la mission

Il commence par l’identification des « causes », autrement dit les grandes thématiques et orientations de la stratégie de développement de l’économie numérique. Il s’agit notamment, d’effectuer :
  • Le cadrage des objectifs de la mission auprès des commanditaires 
  • Le transfert de connaissances contextuelles ; 
  • L’analyse des livrables issus de la phase 1 ; 
  • Des entretiens auprès des commanditaires ; 
  • L’identification et sollicitation des champions “naturels” pour chaque cause. 

B. La mise en place des outils d'engagement.

Il s’agit notamment, d’effectuer la mise en place d’outils tels que Meetup, FB pages, Google Groups, LinkedIn, Google+, blogs, twitter, eventbrite, feuille de route et fiches-action en ligne, etc. Ces outils seront alimentés en flux continu à partir des sessions de travail du GTN.
Cette mise en place permet d’effectuer :
  • Un inventaire de l’existant ; 
  • Un diagnostic de réutilisation : maximiser la valorisation de l’existant ; 
  • La création des maillons manquants ; 
  • La création des connections (invitations dans les groupes, listes, etc.). 

C. La constitution du GTN : animation du kick-off meeting

Il s’agit d’effectuer lors de la première réunion :
  • La présentation de la boite à outils (Maven toolkit) 
  • La création du récipiendaire central des travaux (backlog) 
  • La sélection des premières actions et des suivantes 

D. Exécution des sprints

Nous opérons sur des cycles dénommés « sprint », évalués à 3 semaines environ, au début desquels le GTN détermine en session plénière animée par l’équipe projet, une combinaison d’activités réalisables durant la période.
Puis à la fin de la période de réalisation, le GTN se retrouve pour une revue rétrospective, célébrant les succès, analysant les tensions (définies comme des écarts entre les objectifs souhaités et l’état des lieux) et déterminant les prochaines activités :
  • Shipped ! : Revue des livrables du cycle ; 
  • Like / Dislikes : partage de sentiments ; 
  • Agenda du prochain cycle d’activités ; 
  • Rendu du rapport d’étape. 

Evaluation du niveau d'effort

Sous réserve d’analyse plus précise de l’existant, notre démarche d’intervention se base sur différentes activités, présentées ci-dessous. La quantité d’occurrence (…) constitue la base d’estimation de notre charge de travail.

ActivitéDescriptifQté
Consultation publique
appel ouvert aux contributions, avec un objectif de « recrutement » au sein de la communauté numérique.
1
Entretiens individuels
auprès d’experts, d’acteurs locaux, nationaux ou internationaux
5 à 10
Conférences
d'une personnalité reconnue sur un thème donnée
2
Billet
Article de blog relatant l'actualité de la semaine, les rencontres, les événements, les actions.
10 à 15
Ateliers thématiques
Réunion de travail formelle sur une thématique donnée avec un objectif de contribution à la définition de la stratégie numérique
5
Apéro meetup
Réunion informelle et ouverte sur une thématique donnée, avec pour objectif de créer et consolider les réseaux
3 à 5
Matchmaking 
Organisation de rencontres qualifiées entre deux parties prenantes destinée à créer de la convergence
3 à 5
Sondage d'opinion
Enquête en ligne auprès de la communauté identifiée des acteurs du numérique
2
Ne sont pas mentionnés ci-dessus : étude bibliographique, rédactionnel, synthèse, outillage, animation des communautés en ligne. 

Produire un livrable pérenne et résilient.

In fine, le livrable essentiel de notre étude-action sera donc une communauté de personnes agissant dans la région PACA solidarisés autour d’un nombre clair d’objectif communs et engagés de façon durable dans un plan d’actions pour les soutenir. La démarche de l’étude-action consiste ainsi à transmettre et partager de nouveaux usages afin que l’accroissement de la communauté et le renforcement des liens et des échanges au sein de l’écosystème PACA et avec ses partenaires (français et internationaux) se poursuive et continue de s’accélérer au-delà de la mission.

mardi 7 janvier 2014

L'information : elle vous chatouille, ou elle vous gratouille ?

Dans le monde jadis cloisonné, l'information circulait pour l'essentiel localement, et pour aller plus loin, devait remonter une chaîne d'information, passer filtres et barrages, pour enfin jouir d'une diffusion plus large... et même massive.

C'était l'époque du mass-media.

Des sociétés comme Reuter's ou l'Associated Press, ont fait leur fortune en construisant des réseaux énormes, étendus, au maillage finalement assez grossier mais efficace, pour accéder à de l'info, la remonter, la centraliser, puis la redistribuer.
Ensuite, les journalistes, rédactions, éditeurs (radio, tv, print) en sélectionnaient puis diffusaient une petite partie.

La déroute de l'industrie du disque n'était que la partie émergée de l'iceberg

Les informations "professionnelles" économiques, commerciales, sociales, fonctionnaient finalement de la même façon: quand un événement local se produisait (climat exceptionnel qui donnera une très bonne récolte, un incendie dans une fabrique de composants, etc.), l'information devenait rapidement accessible aux gars du coin qui bossent dans le secteur. Lorsque une info tombait dans l'oreille d'une multinationales et remontait suffisamment haut dans la hiérarchie et près du siège, elle pouvait être utilisé et constituait un avantage concurrentiel. Ce qui ne remontait pas... tant pis (tant que le concurrent ne l'avait pas non plus) !

L'information était rare, précieuse, car peu liquide. La transporter et la traiter coûtaient cher. L'avantage concurrentiel de la contrôler concernait aussi bien l'entreprise que l'employé qui décidait comment l'utiliser. L'employé qui exerçait ce contrôle, pouvait le faire dans l'intérêt de l'entreprise (vérification de la qualité de la donnée, analyse, gestion de priorités, etc.) ou dans le sien seul (politique interne, promotions, statut)

Couverture de Newsweek #lastprintissue

Aujourd'hui l'information est fluide. Les grands groupes media en ont fait les frais (très bien expliqué par Clay Shirky, dans Here Comes Everybody).

Unfair advantage?

Côté business, les réflexes de traitement classiques pénalisent désormais les grandes structures (grandes entreprises, collectivités) au profit des petits, des indépendants, des startupers. Et de "visionnaires" finalement pas toujours si visionnaires, mais surtout capables:
 - d'une part de s'appuyer sur des sources d'information ignorées des analystes et professionnels old-school (qui s'appuient encore beaucoup sur les canaux de diffusions classique, ou leurs versions "en ligne" qui finalement n'apportent pas grand chose de plus).
 - d'autre part de diffuser et traiter rapidement l'information, et de renverser cet avantage concurrentiel qui favorisait jadis les plus grands.

L'installation d'intranets n'a guère modifié l'attitude des individus vis-à-vis de l'information, et le déploiement de réseaux sociaux d'entreprise n'aidera pas si un travail de fond sur l'usage et sur la connexion n'est pas réalisé. 

Après la quantité énorme d'emplois et de métiers qui ont disparu dans les industries de la musique et la presse, ce sont progressivemement des catégories entières de salariés qui vont voir tout ou partie de leurs tâches et savoir-faires devenir obsolètes. Les entreprises (et collectivités et états) qui le comprennent déjà ont peut-être de nouveau l'avantage... 

dimanche 5 janvier 2014

Le numérique est un OUTIL, pas un secteur !

Une réflexion sur la problématique numérique est aussi l'occasion de repenser les relations des employés avec leur travail et leur mission. C'est l'outil idéal pour reconnecter les gens avec les niveaux supérieurs de la pyramide de Maslow et de ne pas tout traduire en argent, en carbone (et temps passé), mais aussi penser aux flux de connaissance, de sentiments, et de confiance.Tous ces flux font partie intégrante des échanges réalisés grâce aux outils numériques utilisés dans le cadre privé, mais restent généralement absents du cadre professionnel ou de la frontière, souvent de plus en plus floue, entre les deux.C'est aussi pour cela que les réseaux sociaux d'entreprise atteignent rarement les niveaux de pertinence, d'efficacité ou d'adoption de leurs pendants grand public, et que les comptes twitter ou facebook d'entreprise sont perçus comme des outils de propagande et ignorés.